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Estimée à 150 individus au début du XXe siècle, le recensement à la fin des années 1980 de  la population d’ours dans la chaine pyrénéenne porte leur nombre à huit. En cause, le braconnage certes, mais avant tout l’avancée progressive de l’Homme sur les territoires naturels, source de constructions urbaines, déforestation, le tout appuyé par les battues administratives (obligatoires jusqu’à la moitié du XXe siècle et en vigueurs jusqu’en 1969) et la chasse à l’ours (interrompue en 1958).

 

 

L’interdiction de la chasse à l’ours, en 1962, préfigure une législation internationale qui établit  en premier lieu de classer l’ours et le loup gris comme « espèces à protéger » : la convention internationale de Washington en 1973, la convention de Berne en 1979… L’ours, par transposition de la Convention européenne à la législation nationale dans le Code de l’environnement, devient officiellement protégé en France en 1981. Disparu du territoire français en 1939, le loup, quant à lui, bénéficie du statut « d’espèce protégé » dans le droit national à partir de 1989, qui prendra effet en 1993 après sa réapparition sur le territoire français l’année précédant

 

Toutefois, ces décisions politiques ne se font pas sans le support et le développement progressif d’un mouvement Ecologiste en France en faveur de la protection de l’ours (le loup, alors absent, bénéficiant d’une mobilisation moindre). La situation préoccupante de l’ours des Pyrénées conduit à la naissance d’un nombre d’associations dédiées vers la fin du XXe siècle.

La préoccupation environnementale naissante, qui s’accompagne d’une prise de conscience de l’épuisement des ressources contribue à porter un mouvement écologiste grandissant qui se traduit notamment par l’émergence d’une protection de la faune et la flore, et ici,  des grands prédateurs.

 

 

Protection  et conscience ecologique

 

Une  mobilisation  associative :  le   lobby  ecologiste 


Précurseur, le Fonds d’intervention éco-pastoral (FIEP) est crée en 1975. Ses actions sont par la suite épaulées, complétées par le soutien d’autres associations plus ou moins directement dédiées à la protection de l’ours : Sepanso-Béarn, Aspas, WWF France, Pays de l’ours-Adet, Groupe ours, Artus dont la fusion avec le Groupe loup France donnera par la suite FERUS – pour ne citer que les principales. L’apparition du loup dans le Mercantour en 1992 entrainera de même une mobilisation associative d’une ampleur quasi similaire. Ces associations s’inscrivent dans la naissance d’un véritable lobbying écologiste à l’origine des premiers plans ours, réintroductions, par des actions militantes auprès des politiques nationaux, appuyés par les conventions internationales et européennes. Associées pour une grande partie sous des collectifs comme Cap Ours, ou Cap Loup, ces associations de protection des espèces disposent ainsi d’un impact plus important auprès des décideurs politiques.

 

 

Une   mobilisation   institutionnelle   pour  la   protection   des   especes 

 

La mobilisation autour de la protection des espèces n’est toutefois pas l’apanage des associations. La corrélation des actions se traduit dans la mise en place de certains programmes, tels que LIFE (« For a conservation plan for threatened species in the French Pyrénées», puis «  Conservation of great carnivores in Europe : Wolf in France »,  crée avec le support financier, législatif et logistique de l’Union européenne, les directives habitats ; la création de l’IPHB…) cette liste non exhaustive traduit la cristallisation d’une mobilisation environnementale progressive dans les politiques internationales et nationales.  

 

Ecolos  bobo  contre  hurluberlus  des  montagnes ?

 

Les associations créées ne concernent pas uniquement la protection des espèces. Les syndicats agricoles, l’Association pour le Développement Durable de l’Identité des Pyrénées (ADDIP), un collectif de quatre associations, ou encore l’association Eleveurs et Montagne dans les Alpes, se mobilisent à leur tour pour défendre un autre aspect de la protection des espèces : celle de la condition des bergers et de l’impact des grands prédateurs sur leur métier.

Ces « oppositions » donnent lieu à l’utilisation d’images évocatrices et de représentations significatives entre les acteurs. En se nommant, les acteurs s’attribuent tout un tas d’attitudes attendues d’eux : « bobos écolos » « bobos parisiens », voire parfois « khmers verts » pour qualifier les « écolos » ; « éleveurs rustres, incapables de dialogue et parfois enclin à une certaine violence », « de mauvaise foi », « hurluberlus » pour nommer les éleveurs. Les représentations des acteurs opposées contribuent à légitimer des discours, des argumentaires, des actions ou, au contraire, à en montrer le côté irrationnel. Ainsi, un éleveur qui manifeste ne sera pas représentatif de la majorité pour un militant écologiste, il sera marginal et « de mauvaise foi » car ne voulant pas admettre l’importance du maintient des espèces protégées. À l’inverse, les associations de défense des animaux peuvent devenir des « khmers verts » pour certains syndicats d’éleveurs, mettant ainsi en avant leur caractère extrême, jusqu’au-boutistes et irrationnel.

 

 

 

  >> Mais la controverse que soulève la protection des espèces dépasse les sphères militantes ou syndicales, et est venu contaminer, ces dernières années, de nombreux sites de l’espace social.

 

naissance  du  mouvement  ecologiste autour   de   la  protection  des especes   et  representation significative   des  acteurs 

associations    constitutives    de   cap  ours   et   cap   loup 

manifestation le 28/11/2004 en faveur de la sauvegarde des ours dans les Pyrénées.